News221 – Même s’il n’y a pas eu de nouveaux éléments probants, les appels à considérer plus sérieusement l’hypothèse d’un accident de laboratoire à Wuhan se multiplient On fait le point sur ce que l’on sait à ce jour, et, surtout, sur ce que l’on ne sait pas
Depuis le début de la pandémie de Sars-Cov-2, virus du Covid-19, nombre de théories et hypothèses autour de ses origines ont fleuri. De nombreux experts ont livré leurs analyses et beaucoup de responsables politiques ont donné leur avis. Le rapport publié fin mars 2021 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) n’a pas percé définitivement le mystère des origines, posant finalement plus de questions qu’il n’en a résolues. Et même s’il n’y a pas eu de nouveaux éléments probants, les appels à considérer plus sérieusement l’hypothèse d’un accident de laboratoire à Wuhan se multiplient aujourd’hui.
A ce jour, de nombreuses inconnues subsistent, exploitées par le complotisme et la désinformation, et encore compliquées par les enjeux géopolitiques majeurs qui opposent les Etats-Unis et la Chine autour de cette question.
De la chauve-souris au pangolin, de l’accident de laboratoire à la théorie d’un virus fabriqué, l’AFP Factuel fait le point sur ce que l’on sait à ce jour, et, surtout, sur ce que l’on ne sait pas (et que l’on ne saura peut-être jamais) sur les origines d’un virus qui a tué plus de 3,5 millions de personnes dans le monde en près de 18 mois.
Les animaux
Déterminer comment le virus est passé à l’homme est jugé crucial pour tenter d’empêcher la prochaine pandémie.
Dès son émergence, les scientifiques ont pointé du doigt la chauve-souris: le 21 janvier 2020, une étude génétique dans la revue de l’Académie chinoise des sciences la désigne comme « le réservoir » probable du virus. Rien d’étonnant, tant la chauve-souris est un réservoir majeur pour les coronavirus en général. Mais d’emblée ils ajoutent que le Sars-CoV-2 a dû passer par une autre espèce, un « hôte intermédiaire » pas encore connu, avant d’atteindre l’homme.
Le 7 février 2020, des chercheurs de l’Université d’agriculture du sud de la Chine vont désigner un autre animal, qu’ils vont sortir du même coup de l’anonymat : le pangolin.
Selon ces scientifiques, c’est ce petit mammifère à écailles, menacé d’extinction, qui pourrait être l’intermédiaire ayant facilité la transmission du virus à l’humain. Cet insectivore nocturne fait en effet partie des animaux sauvages qui étaient vendus au marché de Huanan de Wuhan, auquel la plupart des premiers cas connus de Covid-19 étaient liés.
Une enquête conjointe d’experts de l’OMS et de scientifiques chinois envoyée à Wuhan en janvier 2021 était chargée d’éclaircir la question des origines et de la transmission à l’homme mais ses conclusions publiées fin mars et disponibles ici (en anglais) ne tranchent pas, plaidant en faveur d’une origine naturelle, probablement la chauve-souris mais sans déterminer l’éventuel « hôte intermédiaire ». Ont aussi été évoqués le vison ou le blaireau- furet.
Les experts n’ont par ailleurs pas exclu une autre hypothèse, celle d’une transmission par de la viande surgelée.
Laboratoires, accident, fabrication
Dès les premières semaines de la pandémie début 2020, ont fait surface des théories selon lesquelles le Sars-CoV-2 ne serait pas naturellement passé de l’animal à l’homme mais aurait été fabriqué et/ou se serait échappé accidentellement d’un laboratoire de haute sécurité de Wuhan, connu pour travailler sur des agents pathogènes.
Cette théorie a été relayée très largement sur les réseaux sociaux et même par l’ancien président des Etats-Unis Donald Trump et son administration, en place jusqu’à janvier 2021 et son remplacement par Joe Biden. Cette thèse a donné lieu à des variantes, voulant que le virus aurait même été fabriqué par l’homme et diffusé volontairement, par exemple à des fins de dépopulation.
Avant le Sars-CoV-2, le SRAS de 2003 ou encore Ebola avait aussi fait l’objet de théories similaires.
Un virus fabriqué ?
Le réseau de fact-checking de l’AFP a consacré des dizaines d’articles par exemple (1, 2,3) à des publications qui, sur les réseaux sociaux, affirmaient avoir des « preuves » montrant que le Sars-CoV-2 avait été fabriqué en laboratoire et même breveté par des Américains ou des scientifiques français. Comme expliqué par exemple dans cet article, ces publications présentaient des brevets antérieurs à fin 2019 portant la mention « coronavirus », oubliant qu’il s’agit d’une famille de virus et qu’il existe d’ailleurs de nombreux coronavirus animaux.
Ces publications oubliaient aussi le double sens du mot « inventeur », qui ne veut pas forcément dire « créateur » au sens commun du terme. Même si le terme de brevet évoque le concept d’invention et porte le nom de « l’inventeur » de ce pour quoi on sollicite un brevet, le mot « inventeur » à deux sens.
Selon le Larousse, un « inventeur » est la « personne qui par son ingéniosité invente, imagine, créé quelque chose d’original, (comme) l’inventeur du téléphone » mais aussi celle « qui découvre un trésor, un objet, etc ».
Ainsi, quand on parle des « inventeurs » de la grotte de Lascaux, on parle bien des quatre jeunes gens qui l’ont découverte en 1940 et non pas des hommes préhistoriques qui en ont orné les parois. Dans le secteur des brevets et de la propriété intellectuelle, le terme « inventeur » désigne celui qui demande le brevet, par exemple pour protéger une technique de diagnostic à propos d’un virus existant. Le site de l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) explique ici ce qu’est un brevet et à quoi il sert.
En mars 2020, une vidéo extrêmement virale avait attribué, avec là encore des brevets mal interprétés, la fabrication du Sars-Cov-2 à l’Institut Pasteur.
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